Bonjour à toi, je m'appelle Daniel Molloy, mais tu peux aussi m'appeler Dany. J'ai de nouveau 30 ans. Dans la vie je suis bisexuel et actuellement amoureux d'un vampire. On me dit souvent que je ressemble à Luke Brandon Field, et surtout je suis issu de Interview with the vampire.

Je m’appelle Daniel Molloy et je suis né il y a environ soixante-dix ans de cela. Je sais, je ne le fais pas, mais on va y revenir. De mon enfance et de mon adolescence, il n’y a pas grand-chose à dire : parents peu présents, une jeunesse passée quasiment dans la rue. Je bossais quand même à l’école parce que je voulais pouvoir avoir un métier correct. J’ai très tôt été attiré par le journalisme, ma « grande gueule » serait très utile dans ce métier. A l’âge de seize ans, je commençais déjà à faire des petits boulots pour un journal de ma ville, oh rien de très folichon, j’étais le stagiaire, celui qui faisait les tâches les plus ingrates, mais en parallèle, on me formait sur le métier. J’ai fini par être engagé par ce journal trois ans plus tard.

A vingt ans, en 1973, donc, j’avais une technique bien rodée pour décrocher des interviews. Mon travail consistait à interviewer des gens, n’importe qui que je pouvais croiser dans la rue et qui avait une histoire intéressante. Pour l’interview que je m’apprête à évoquer, j’étais allé dans un bar gay. A l’époque, je n’assumais pas vraiment mon attirance pour les hommes, mais je passais pour quelqu’un « d’ouvert », si bien que j’ai eu quelques aventures masculines déjà à cet âge. L’homme dont j’ai fait la connaissance s’appelait Louis. Il disait être un vampire. Naturellement, je ne l’ai pas crû. Vous l’auriez crû vous ? Je pensais que c’était une image, un genre qu’il se donnait, mais je décidais tout de même de l’interviewer. Nous sommes allés dans sa chambre d’hôtel et là, il commença à me raconter sa vie. Bordel de merde….c’était vraiment un vampire. Je l’écoutais attentivement, ne manquant pas de réagir à certaines de ses paroles. La vie qu’il dépeignait était vraiment idéale à mes yeux. A l’époque j’étais un junkie un peu paumé qui partageait son temps entre son boulot et la drogue qu’il pouvait s’enfiler. Devenir vampire m’aurait permis de m’en sortir plus facilement, d’avoir une autre vie. Quand j’ai voulu le dire à Louis...il ne le prit pas vraiment bien. Il se jeta sur moi et s’il n’y avait pas eu l’intervention de « l’autre », Louis m’aurait certainement tué. Il a bu de mon sang ce soir là et puis cet autre type a débarqué dans la chambre, il a arrêté Louis, l’a éloigné de moi avant que je ne m’évanouisse. Quand j’ai repris connaissance, j’étais dans une sorte de cave humide et sombre. L’autre homme était là, il ne s’agissait évidemment pas d’un homme, mais d’un vampire, Armand. Je n’étais pas dans une position idéale, j’étais même effrayé, mais cela ne m’a pas empêché de le trouver beau. Armand me libéra, me fit emporter mes cassettes et m’informa qu’il me tuerait quand il se désintéressera de moi, qu’en attendant il allait me suivre pour voir où j’irais, voulait étudier mon comportement. Complètement cinglé, moi je vous le dit. Il m’informa que je pouvais aussi nourrir l’espoir qu’il finisse par se désintéresser de moi et ne prenne même pas la peine de me tuer. Pendant une année entière on a joué au chat et à la souris. Peu importe où je me rendais dans le monde, il était là. Peu à peu, je me suis surpris à aimer cette chasse à l’homme dont j’étais la cible, je commençais à nourrir des sentiments pour Armand, ce qui devait arriver, arriva. Nous sommes sortis ensemble. Pendant presque dix an. Au bout de ce temps, Armand décida qu’il devait me laisser partir, que je devais vivre ma vie sans plus penser à lui. Comment pouvait-il me dire une chose pareille ? D’accord notre relation n’était pas idyllique, elle était faite d’engueulades et de réconciliations, je passais mon temps à lui demander de me transformer et lui refusait, on se disputait, je partais pendant quelques jours, semaines ou mois et je finissais par revenir en rampant vers lui parce qu’il me manquait atrocement. Je l’aimais à en crever et pourtant il voulait me quitter.

Je ne me souviens pas de ce qu’il s’est passé le jour où nous nous sommes séparés, tout ce que je sais, c’est que pendant près de quarante ans, je n’ai plus eu aucun souvenir d’Armand, de notre liaison, je me rappelais de Louis, de l’interview, j’avais aussi toujours la marque de la morsure sur mon cou, mais d’Armand...plus aucun souvenir. J’ai donc fait ma vie sans plus y penser. Je me suis marié, deux fois, j’ai divorcé deux fois, j’ai eu deux enfants, des filles et après avoir été journaliste pendant de nombreuses années, je me suis mis à écrire des livres et enseigner le journalisme. La maladie me frappa : Parkinson. Et puis, il y eut une épidémie de Covid, il a fallu que je sois encore plus vigilent que les autres à cause de ma maladie. En 2022, alors que je prenais le courrier je reçu un colis, je l’ouvris pour y trouver de vieilles cassettes, mes cassettes. Je fouillais alors rapidement dans mes cartons pour en extraire mon vieux magnétophone. Je passais la première cassette et dès les premières secondes, je su ce que c’était...mon interview avec ce vampire. Dans le carton il y avait une lettre, écrite de la main de Louis. Il me priait de venir le rejoindre à Dubaï où il habitait maintenant pour terminer enfin cette interview. Je ne savais pas pourquoi, mais quelque chose me poussa à y aller. Je m’y rendis donc et une fois sur place, c’était comme si le verrou sur ma mémoire se débloquait, je me rappelais d’Armand, de notre relation. Pourtant, Armand fit comme s’il ne me reconnaissait pas ou peut-être pensait-il que ce qu’il m’avait fait, le « charme » qu’il m’avait lancé pour que je l’oublie fonctionnait ? Je n’en savais rien, quoi qu’il en soit, il se faisait appeler Rashid et jouait les serviteurs pour Louis. Et bien soit, puisque c’était ainsi qu’il voulait que je le vois, je vais continuer de prétendre que je ne me souviens pas de lui. Ce conn….cet abruti a effacé dix ans de ma vie et prétend maintenant qu’on ne se connaît pas….je vais voir jusqu’où il va pousser la plaisanterie, si jamais il va finir par me révéler qui il est vraiment. Vous savez le pire dans tout ça, c’est que malgré les années, je l’aime toujours comme un dingue. J’ai aimé mes deux femmes, mais pas autant que je l’aime lui.

La première nuit de mon arrivée à Dubaï, un chaudron est apparu dans ma chambre. Normalement, je suis du genre méfiant, toujours sur mes gardes, mais là, je ne sais pas, je me suis laissé tenter et...je me suis retrouvé catapulté ici, où que cela puisse être. Il y a néanmoins un point positif. Il semble que ma maladie me laisse tranquille ici et puis...j’ai rajeuni, j’ai l’apparence que j’avais quand Armand et moi étions ensemble. Ce n’est pas si mal ici finalement.

De l'autre côté de l'écran ~

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